Dickan "Six" kI-MOON
L’air frais balayait doucement son visage. Les yeux fermés, il appréciait les derniers rayons de soleil qui caressaient son visage. Le bruit des feuilles, la mer au loin qui s’écrasait contre les rochers, tout sonnait comme une douce musique à ses oreilles. Sa main glissa doucement sur le sol, effleurant l’herbe jusqu’à saisir un verre à pied posé à côté de lui. Il le porta à ses lèvres et bu une gorgée de vin. L’alcool fruité était comme toujours digne du goût d’un grand cru.
-Maître? Il va bientôt être le temps de rentrer. Vous êtes ici depuis plus longtemps que d’habitude. Vous allez finir par devenir fou si vous restez trop de temps ici.
Dickan poussa un long soupire et sous la délicate voix grave de Sébastien, il finit par ouvrir ses yeux. Son fidèle serviteur, qui n’était d’autre qu’un grand pingouin parlant vêtu uniquement d’un noeud papillon, se tenait debout devant lui. L’homme poussa un soupire et se redressa pour observer le paysage. En effet, il était resté plus longtemps que d’habitude. Le ciel, devenu violet, était arpenté par d’immenses baleines volantes. Les arbres grandissaient et donnaient en guise de fruits de merveilleux bonbons qui pendaient aux branches. L’herbe rose atteignait presque sa chaise tant celle ci était luxuriante. Il ne parla même pas des grands cerfs qui se déplaçaient avec leur belles fourrures bleues, sautillant sur leurs six pattes. Dickan massa ses tempes.
-Je ne veux pas partir. Grogna-t-il doucement entre ses dents.
Sébastien vient tapoter délicatement sa jambe de sa nageoire et lui tendit à nouveau son verre de vin avant d’aller s’asseoir plus loin. Dickan se leva de sa chaise et observa au loin les récifs et la mer d’un air presque mélancolique. Il bu une nouvelle gorgée et porta soudainement sa main contre sa tête. Un couinement de douleur sortit d’entre ses lèvres et d’un coup, le paysage merveilleux recula. Autour de lui, l’herbe brunissait, les arbres perdaient leurs feuilles comme s’ils mourraient et les animaux fuyaient. Dickan lâcha son verre au sol et se retourna dans tous les sens. Qu’est ce qu’il se passait? Pourquoi son monde parfait se fanait d’un coup comme ça? Le ciel perdit sa couleur violette et prit des teintes rouge et noir. Le décor noircissait lui aussi à vue d’œil. Son mal de tête devint insoutenable, à un tel point qu’il s’écroula sur ses genoux, portant ses mains à sa tête. Il lâcha un cri de douleur. De l’illusion excentrique ne demeurait plus qu’un paysage de desolation cauchemardesque.
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« Six? Réveilles-toi! Ils vont voir que tu dormais, Six! » retentit une petite voix douce au fond de sa tête. Il s’affola, son rythme cardiaque augmentait et il avait de la peine à respirer.
-Non, non, je ne veux pas... je ne dors pas, je ne peux plus.
Tenta-t-il de répondre à cette voix qu’il ne connaissait que trop bien. Soudain, un cri s’arracha de sa gorge. Il baissa ses yeux: du sang. Comme si ses anciennes blessures se rouvraient, du sang s’écoulait de son ventre dans une douleur vive. Mêmes douleurs lui rappelant de vieux souvenirs qu’il rêvait d’oublier. Il plaqua ses mains contre son estomac et balaya du regard le décor autour de lui: tout n’était que ténèbres. Tout sauf deux yeux rouges luisant au loin, surligné d’un immense sourire difforme. Dickan se redressa malgré la douleur, pris de panique.
-Non! Tu n’es pas le bienvenu ici, c’est chez moi, va t’en!!!
Il plaqua ses mains couvertes de sang sur sa tête.
-LAISSE MOI TRANQUILLE! Arrête tu vas me tuer!
Criait-il aux yeux rouges avant que tout ne disparaisse et que Dickan daigne à rouvrir ses paupières. Il était de retour dans le monde réel, loin de son illusion décadente. Il ne comprenait pas ce qu’il s’était passé. Six déposa ses yeux violets vifs sur la table face à lui ainsi que sur son jeu de cartes. Il cligna plusieurs fois pour s’assurer que tout était vrai et secoua la tête. Il reprit un immense sourire comme à son habitude et porta sa bouteille de vin, enroulée dans du papier journal, à ses lèvres pour en boire une gorgée.
-Quelle belle journée, il ne faut pas que j’oublie de cueillir des fraises, c’est la saison.
Clama le diseur de bonne aventure, d’un air complètement détaché. Perdait-il la tête? Ou bien était-ce juste son état normal?